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Winston Churchill et les Jonagold

Lundi après-midi au supermarché, je me sers de pommes Jonagold, les meilleures, celles qu’on avait aussi dans notre jardin quand j’étais plus jeune. Un monsieur, ma foi très âgé, s’approche de l’étal. Il vient faire ses courses en costume bleu foncé motif prince de galle et souliers du dimanche.  -Il paraît qu’il faut manger des pommes. Winston Churchill a dit qu’il fallait en manger une par jour. Vous connaissez Winston Churchill? -Oui, bien sûr! -Il est mort vieux! À plus de 90 ans. Eh bien moi, j’ai 89 ans et demi. Mon médecin m’a dit de manger des pommes, c’est bon pour la prostate. Il faut bien se soigner. -Prenez des Jonagold, ce sont les meilleures, elles sont sucrées. Ici,le numéro 320. -Merci! C’est que je coûte cher à la société. -Bonne journée! Que vient faire un homme de nonante ans en costard au supermarché? Trouver de la compagnie…discuter, tester ce qui lui reste d’humanité. Winston Churchill disait : « Une pomme par jour éloigne le médecin pourvu qu’on vise bien… »

Writing day 8, une question d'éducation.

13h24, je sors des "toilettes des profs". J'y croise une "jeune collègue" qui doit bien avoir 12 ans de loyaux services à l'Etat. J'en ai 15 depuis quelques semaines. Nous évoquons nos collègues à la retrait qui chantaient souvent ce refrain : "C'est une question d'éducation." Et ma foi, on se joint aussi de plus en plus souvent à ce choeur … S'occuper d'adolescents n'est jamais ennuyeux: les jeunes sont inconstants, comme la lune, comme les étoiles, comme tous les êtres humains. Ils sont des jeunes-pousses toutes frétillantes et impatientes de goûter à la vie. Certains jeunes connaissent sa saveur un peu plus tôt que les autres, malgré eux... S'ils ont parfois l'air imbéciles, c'est parce qu'ils sont en groupe (de 29 souvent); il faut jouer un rôle, épater la galerie, faire rire surtout, parce que la vie, c'est trop sérieux. S'ils sont trop sensibles, c'est qu'ils sont jeunes, fragiles, sans

Les sachants

Le sachant s'oppose à l'apprenant. Le sachant sait, c'est une personne, non un contenant. L'apprenant apprend, c'est un chasseur-cueilleur de tout ce qui pourra le faire grandir. Lorsqu'il a suffisamment cueilli, l'apprenant devient un sachant. On a donné beaucoup de noms à ce genre de personne à travers les siècles: les sages, les savants, les pédagogues, les philosophes, les maîtres, les guides, les sorbonagres, les vieux cons, les ancêtres, les passeurs... On ne savait plus quoi inventer dans le sème du savoir qui pourrait paraître pas trop normatif ou discriminant alors on a pris le participe présent du verbe savoir pour être proche du sens premier sans entendre qu'il chantait comme "sachet". Finalement, le sachant n'est-il pas un sachet? 

Les mûres ont un goût de mois d’août

Rondelettes, noires, un peu molles, elles sont prêtes à être dégustées. On les cueille au fond du jardin, le récipient accroché à la ceinture, la canne d’Emma dans la main gauche pour écarter les ronces sans se piquer. Leur saveur imprègne la bouche jusqu’à rendre le fond du palais pâteux; leur teinte est violette sur les dents et sur les doigts. La mûre a un goût si condensé qu’elle ne peut pas être qu’une simple baie de fin d’été. Le petit fruit si rustique raconte beaucoup d’histoires. Il dit les fins d’après-midi au fond du jardin potager de grand-maman Odile, la confiture intense qui rappelle le mois d’août au cœur de l’hiver quand elle s’étale sur le pain un dimanche matin, le gâteau sans acidité mais trop de douceur, les fins de vacances, la nostalgie des prés aux herbes trop hautes, les mirabelles qui doivent être mûres elles aussi au verger. Prendre une mûre bien noire entre le doigts, estimer sa souplesse, l’écraser avec la langue contre le palais, juger du sucre dans le jus

Malena

Madeleine, Marie-Madeleine, la prostituée, la femme seule, sans mari, sans enfants, l’objet de tous les désirs, de toutes les convoitises, de toutes les jalousies. Malena c’est l’être humain dans sa bestialité mais c’est aussi la tragédie de l’Histoire. Malena, c’est la condition de l’être humain: vivre seul, trouver sa place, lutter pour sa survie, se taire et avancer, fatalement. Malena, un grand film de Giuseppe Tornatore avec une musique d’Ennio Morricone.