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Affichage des articles du février, 2021

Bohème

 De Rimbaud à Aznavour, il n'y qu'un pas pour un thème archi-universel: la Bohème... On habitait à la Grand'Rue, "la rue des riches" dans l'autre langue, on payait rien, on habitait en collocation avec les voisins, pour dix mois dans un appartement prévu pour les autres, ceux qui ont les moyens. C'étaient nos premiers salaires, notre première maison, notre indépendance, le début de la vie, la vraie. Un logement avec vue: sur la Lorette, la Sarine, la Motta. Les cris des enfants montaient en été et la diane nous réveillait aux aurores à la Fête-Dieu, suivie des coups de canons. Et tous les samedis 5h, c'était le marché qui s'installait. Des dîners avec les artistes du haut, des messages passés au balcon, des déjeuners dehors un 1er novembre, un mur rouge et une salle de bain vétuste, une cuisine sans fenêtre et des mètres carrés de salon. C'était la grande vie avant l'heure, c'était goûter au luxe sans s'en vouloir. On partageait nos

Retour de Z.: le sable dans la valise.

C'est le moment du départ. Les vacances de neige étaient magnifiques. On ouvre la valise, on y découvre le sable de l'été passé. Il se mêle à la neige fondue pour fixer les souvenirs lumineux des beaux jours libérés. On plie les vêtements de ski tout en imaginant les prochaines vacances, à la mer ou à la montagne si la pandémie le permet. On rêve d'Italie, elle qui était si proche et pourtant inaccessible, on renvoie nos envies à plus tard. A la honte d'un séjour prestigieux succède le bonheur d'un séjour immaculé, inondé de soleil. Nous rentrons tout à l'heure pour recommencer les semaines, masqués, à manger des sandwichs cachés derrière nos stores en attendant l'ouverture des bistrots et des frontières. Ici, la tension était moins nette, là-bas, elle nous guette. Rien ne vaut une belle piste noire au petit matin pour saisir la liberté même masquée.

Rosa

  Rosa c’est l’oubliée, celle qu’on n’a pas connue, qui est partie trop tôt, à la fleur de l’âge, lorsque tout devrait être possible. Or seule la mort l’a été. Elle est partie, laissant enfants et mari, appelée par le ciel et l’éternité. On ne l’a jamais vue et pourtant, son portrait demeure : médaillon de vieux journal découpé, soigneusement encadré. Ils lui ressemblent, elle paraît douce mais volontaire. Elle ne se fera jamais appeler « mamie » et restera à jamais la maman partie trop tôt.