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Affichage des articles du mars, 2023

Une Helvète en France.

Heidi regardait défiler le paysage jurassien en cette fin d’après-midi de mars. Naïve, elle avait cru qu’en esquivant la grève les deux dernières fois, cette fois-ci serait égale et sans heurts. Mais c’était quand même « mardi noir » en France. 4 TGV annulés sur 5. Ça ne sentait pas bon. Elle avait tout contrôlé. Tous les signaux étaient verts. « Elle avait de nouveau de la chance », pensait-elle.   Et puis il y avait eu ce panneau sur le quai : « Retard indéterminé ». Elle avait quand même contrôlé sur le site de la SNCF, qui était moins optimiste. On annonçait une heure, puis rapidement 3h30 de retard ! Heidi se demandait : « Est-ce que je peux aller aux toilettes dans l’intervalle ou je vais louper mon TGV ? » Elle scrute le quai, entrevoit un gilet jaune fluo. Elle s’approche. Un employé des CFF. Deux possibilités : 3h30 de retard ou un train suisse qui amènerait les passagers vers Vallorbe. « Non, mais vous avez largement jusqu’à 18h  pour aller faire pipi. » Ok. Heidi s’en va che

Quand les grévistes rencontrent les Bisounours.

Mardi noir en France. On vous conseille de contrôler les informations concernant votre train sur le site de la SNCF.  Lundi 17h, tout est ok. Votre train ne subira aucune perturbation. Mardi 11h, le site internet est toujours serein. Confiante, Heidi prend sa valise, court sur le quai 4, comme d’habitude. Le TGV a un retard indéterminé. 60 minutes. Non, 3h30. Arrivée prévue à Paris: minuit 39. Appel à l’hôtel pour prévenir d’une arrivée très tardive… Et là, soudain, la gare de Lausanne prend les devants! Un mystérieux employé des CFF à la grande idée d’organiser un train suisse partant de Lausanne à la rencontre du TGV… pour gagner du temps! 40 minutes plus tard, le petit train régional helvétique s’en va vers le Jura. Les CFF sont super! Les CFF sont bienveillants. Jour faste pour les employés des chemins de fer fédéraux ; ils sont de bonne humeur aujourd’hui. Déjà en arrivant au bord du lac Léman le conducteur avait indiqué son émerveillement au haut-parleur. Arrivés à la gare de Val

C'était quoi ta cassette préférée?

Un soir de semaine, souper en toute sérénité. Maman demande : "C'est quoi le morceau de musique classique dont vous vous souvenez et qui sera à jamais votre référence pour dire que c'est depuis là que vous avez aimé la musique?"  "La quarantième! Dans la cour du château ! C'est sûr, pour moi, ce sera toujours la quarantième!"  "Oh, moi je sais pas encore.Ce sera peut-être Vivaldi, le Printemps. On verra. "  "Moi, Mozart, le concerto..." "...en la majeur !" "Tu as raison! C'est fou ! Ou peut-être Beethoven..." "Le concerto pour piano n°2 de Chopin par Zimmermann, et le concerto en la mineur de Schumann". Les deux cassettes que maman m'avait achetées chez Denner, dans le grand panier. J'ai dû faire un noeud à la bande, tellement je l'avais écoutée. Des passages grésillent, vibrent, mais ce sont ces deux oeuvres à tout jamais.

Céciloute aux urgences

Vendredi, 15h. Cécile attend aux urgences avec son grand-papa. Maman arrive. Beau-papa est venu  chercher la petite fille de 6 ans à l'école suite au téléphone de la maîtresse à la maman. " De toute façon maman, tu sais, c'est toujours les garçons qui commencent. " Eh oui, difficile de dire le contraire ! Le désir de gagner aura eu raison de l'humérus gauche de la petite fille perchée pour le jeu. Il la pousse. Elle tombe. Sur le coude ; ça craque, plus haut, l'humérus. Le bras fait un S. Le personnel soignant cache sa terreur derrière une main couvrant l'orifice de l'expression médusée. Oui, c'est horrible, mais il ne faut pas le montrer. Des sirops, des granules, de la poudre de fée dans le nez. Voilà petite Cécile parée pour attendre neuf longues heures dans son fauteuil, son bras posé sur un coussin. On prévoit l'opération pour 17h30, 18h, 19h30, 21h, 23h, non, elle passera à minuit. Philosophe et résistante, elle s'endort sur son faute

L’assemblée générale

C’est prévu un lundi soir. Le comité est convoqué très tôt. Les membres éclectiques s'entrainent à lire des textes écrits ce jour-là, six mois auparavant, ce jour devenu inévitable pour les graines d’écrivains. C’est une empreinte des Fribourgeois dans un fonds d'archives qui s'en ira dormir dans un carton à la BCU.  Hier soir, les archives ont dévoilé une dizaine de textes. On a donné une voix à des impressions de quidam, des premiers jets d'une demi-heure inscrits sur papier ou écran lors de ce rendez-vous étrange de chaque 27 septembre. On a écrit dans les écoles, au café de l'Ancienne Gare, depuis la maison. On a légué son texte sans bien savoir si ça serait utile. Mais on a aimé le faire. Il faut parfois s'asseoir pour écrire. 2022 aura été l'année des questionnements dus au climat, au manque d'humanité dans nos vies technologisées, la guerre en Ukraine, la montée aux extrêmes. Des sociologues du futur verront peut-être là une société en crise. Une