Éphémères

Places D-2 à 5 rang 1. Nous voilà installés pour une heure trente d’émotions! Les artistes sont à cinq mètres. Les enfants sont concentrés. Dehors il fait déjà nuit, mais l’horaire leur est destiné: 17h un dimanche, c’est idéal pour initier nos bambins aux concerts…classiques.  La sonate d'Elgar nous fascine par son intensité. Vaughan Williams apporte un peu de légèreté au coeur des notes vespérales et sérieuses. Enfin, la sonate de Franck nous subjugue, surtout son troisième mouvement tout en gravité et virtuosité. On applaudit. Cécile se réveille. On se lève pour féliciter les deux artistes et montrer notre bonheur. Ils reviennent. Gianni Schicchi, Thaïs ... les musiciens sont généreux, ils aiment jouer et faire plaisir au public. On les acclame encore.  Tous les mélomanes sortent au froid un sourire béat aux lèvres: la musique guérit les coeurs et les âmes. 

Il lui demande quel genre de livre elle désire car il se rend à la bibliothèque. Il la gicle dans le bain. Elle rit de son rire forcé et pourtant spontané. Il s'exerce au piano pour l'accompagner au violon. Elle pleure parce qu'il ne l'attend pas. Elle est triste parce qu'il part sans elle. Il l'étouffe puis s'excuse. Elle le frappe puis dit pardon. Elle lui vole sa peluche. Il pique un fou rire. Ils dansent dans le salon en sautant. Ils s'endorment côte à côte une heure durant.

Qui n’a jamais été face à ce dilemme au moment de choisir sa boisson désaltérante un été en   terrasse?   “Vous avez de  l’ice tea   pêche?”   “Non, désolé.” Vous avez du thé froid   normal ?” “Non, on a que de   l’ ice   tea   pêche.” C’est toujours le même discours. On ne tombe jamais sur ce que l’on désire.   Essayez avec le   rivella, boisson nationale, c’est pire. Quand il n’y a pas de bleu, il y a du   rouge ;   quand il n’y a pas du rouge, il y a du bleu.  C’est le fruit du hasard et des stocks de nos bistrots. Hormis l’existence parfois aléatoire de  l’ice tea  sur les cartes de boisson, une interrogation me taraude:  qu’est-ce donc que cet énième anglicisme au fond de nos verres ?  Parlons des mots :   ice   tea.   Ça sonne moderne, ça glisse, c’est trop sucré, c’est industriel, ça s’achète tout prêt dans un berlingot bleu. C’est le souvenir des goûters d’anniversaires dans les années nonante, la boum du camp de ski ou les quatre heures chez la tante de Renens. Mais ne devrait

 ... sur des rythmes nostalgiques de ses premiers dance floor. Aucune ride ne vient assombrir sa joie de tournoyer sur la piste. Ses amis l'entourent en frappant des mains, on s'agite, on se désaltère, on lève son verre, on se dandine, on sue en chœur, c'est une soirée d'anniversaire réussie. A l'apéro, le champagne coulait à flots, un millésime pour la jubilaire. Les voix sont hautes et fortes, la gravité n'est pas invitée. On est beau, scintillant, les spots jouent avec nos paillettes. "Toute première fois", "A nos actes manqués", "I maschi", "Waka waka" et j'en oublie. Une fête comme on n'osait plus en rêver. Parce que c'est possible, parce qu'il faut vivre malgré tout, parce que ça semble juste pour l'humain qui veut crier son désir social du fond de nos coeurs. Merci Sophie.