Bohème

 De Rimbaud à Aznavour, il n'y qu'un pas pour un thème archi-universel: la Bohème...

On habitait à la Grand'Rue, "la rue des riches" dans l'autre langue, on payait rien, on habitait en collocation avec les voisins, pour dix mois dans un appartement prévu pour les autres, ceux qui ont les moyens. C'étaient nos premiers salaires, notre première maison, notre indépendance, le début de la vie, la vraie. Un logement avec vue: sur la Lorette, la Sarine, la Motta. Les cris des enfants montaient en été et la diane nous réveillait aux aurores à la Fête-Dieu, suivie des coups de canons. Et tous les samedis 5h, c'était le marché qui s'installait. Des dîners avec les artistes du haut, des messages passés au balcon, des déjeuners dehors un 1er novembre, un mur rouge et une salle de bain vétuste, une cuisine sans fenêtre et des mètres carrés de salon. C'était la grande vie avant l'heure, c'était goûter au luxe sans s'en vouloir. On partageait nos restes de frigo tout en débattant autour d'un verre de vin sur une table en chêne et des chaises d'écoliers. 

Depuis longtemps, la Grand'Rue est devenue hors de prix, la vue a changé, les amis se sont séparés, d'artistes nous n'avons que nos rêves et nos souvenirs. On était jeunes et insouciants, même si on ne le savait pas. La Bohème c'était avant. 

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