« Je » est un monstre (version longue).


 Le titre génial de l’exposition temporaire de « La maison d’ailleurs », fameux centre helvétique de la science-fiction à Yverdon. Mais rassurez-vous, mon texte n’aura de science que la dénomination de son pronom et de fiction que l’aura d’une illusion.

Ne vous êtes-vous jamais demandé quel monstre se cachait en vous ? A quand date votre dernière entourloupe, votre dernier mensonge, une petite mesquinerie ou ce ricanement narquois ? Oh, ne vous dissimulez pas derrière une statue édifiante d’un autre siècle, vous en avez un, c’est sûr ! Peut-être est-il caché dans un bahut moisi au fond de votre deuxième cave, mais il existe et vous l’avez peut-être oublié.

Est-il visqueux, sombre, poilu ? Se transforme-t-il à minuit s’il a mangé des fraises ? Craint-il la lumière ou le clair de lune ? L’avez-vous seulement déjà rencontré ? Peut-être ignorez-vous son existence et pourtant, il vous observe, il vous sent, il respire en vous.

« Je » pourrait se nommer « culpabilité ». Ne vous est-il jamais arrivé de regretter vos actes ou vos paroles ? De vous laisser alors ronger par ce sentiment malsain et destructeur qui vous enlise dans vos travers. Ce « je »-là est mesquin, il vous accuse à tort et à travers et ne vous laisse jamais tranquille.

« Je » pourrait être cette peur pétrifiante. Peur de l’inconnu, peur du regard des autres, peur du noir, peur de la sorcière dans la poubelle, peur de tout et de rien ; ou non, plutôt de l’échec. Déplaire par son propre aveu de faiblesse. Ne plus plaire et mourir d’inquiétude.

« Je » c’est les autres ; ou le regard des autres. Ce jugement perpétuel et conscient qui vous compare à la morale, le juste, le vrai, ce qui ne fera pas de vague. Le monstre fait des vagues, que vous le vouliez ou non. Et plus on l’oublie, plus la vague sera violente.

« Je » c’est ce que je ne suis pas. On aurait bien aimé exclure tous nos défauts pour paraître candide et propre. Le monstre n’est jamais salubre. Il vient tacher votre quotidien et vos pensées. Il n’a rien de blanc et de pimpant, il rampe dans la fange de vos gouffres amers.

« Je », quel pervers ! Après tout, « je », vous n’êtes qu’un vicieux phénomène ! Vous tournez toujours les choses dans leur complexité profonde, n’imaginez que le pire, titillez les travers de chacun. Vous ne nous laissez jamais tranquille ! Quelle force insoupçonnée pourrait vous faire taire, enfin !

« Je » est certainement votre pire ennemi. Oui, on lui cherche des excuses derrière le moi, le surmoi et ça. Finalement, « je », sous couvert de nous donner une identité et de nous inscrire dans l’individualité, vous n’êtes qu’un ça et rien ne vous arrêtera.

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